Périurbanisation spontanée et développement des modes de transports dits « artisanaux » dans la métropole de Yaoundé

Yannick MENDOUGA, Marthe Aime ELONG NGANDO EPOSSY, et Cyrille Gabriel NGUIDJOI

 

Introduction

La périurbanisation spontanée est un phénomène qui demeure encore très complexe jusqu’à nos jours. Depuis quelques décennies, la ville de Yaoundé qui représentait 16 % de l’espace communal actuel s’est étendue de manière spontanée et rapide sans planification et sans infrastructures adéquates. Cette situation vient du fait et par la démission de l’État de ses missions régaliennes de construction et d’aménagement du territoire (Tchékoté et Ngouanet, 2015), mais aussi de la forte croissance démographique (Sakho et al., 2017) avec un taux de 52 % en 2015[1]. L’étalement y relatif donne naissance à des quartiers périurbains populeux dont la majorité de résidents et résidentes pratiquent une activité au centre urbain. L’augmentation des besoins de déplacement met en exergue un sérieux problème de mobilité urbaine. Ces périphéries spontanées mal reliées à la ville, comme le soulignent Saidou et Motcho Kakou (2012), ne sont pas suffisamment couvertes par le transport institutionnel et moins viabilisées en termes d’infrastructures de transport. Pourtant, l’extension des couronnes périurbaines fait de l’automobile un des moyens de mobilité incontournable (Bureau et Thouverez, 2007). Cette incapacité étatique à répondre aux besoins de déplacements de ses populations laisse entrevoir, au fil des années, des modes de transport non institutionnels, voire « artisanaux ». Comment la périurbanisation spontanée peut-elle favoriser l’émergence du mode de transport dit « artisanal »? La réponse à cette question centrale se trouve dans l’analyse de la corrélation entre la périurbanisation spontanée et l’expansion du mode de transport dit « artisanal » dans la métropole de Yaoundé? Ce travail s’articule autour de la théorie centre-périphérie de von Thünen (1826)  selon laquelle le centre rassemble tout ce qui est attractif, développé, nouveau et prestigieux, et la périphérie est définie négativement par rapport à celui-ci.

Figure 1. Métropole de Yaoundé et périphéries voisines

Méthodologie

La méthodologie de recherche utilisée dans le cadre de cette étude est essentiellement analytique. Elle permettra de faire une synthèse transdisciplinaire systémique des facteurs liés à la périurbanisation spontanée et le développement des transports dit « artisanaux ». Cette étude est fondée sur des observations faites sur le terrain, la recherche documentaire et les entretiens menés auprès des gérants et gérantes de stationnement du transport artisanal desservant la périphérie, ainsi que des passagers et passagères empruntant ce type de transport public. Les données collectées ont été catégorisées en données primaires et secondaires.

Les données secondaires proviendront essentiellement de la revue de la littérature faite en ligne, au ministère de transport et à la communauté urbaine. Celle-ci porte sur la question du transport « artisanal » en général et au Cameroun en particulier, sur les textes qui réglementent ce type de transport d’une part et sur les questions de périurbanisation et leurs effets induits d’autre part.

Les données empiriques quant à elles sont succinctement le fruit des interviews semi-directives auprès des 07 gérants de stationnement du transport artisanal desservant la périphérie à partir du centre urbain et vice-versa. Nous avons également interrogé 70 passagers et passagères sélectionné·e·s au hasard, soit 10 par site d’embarquement. Enfin, nous avons échangé avec des responsables du ministère du transport réglementant ce secteur.

Les outils mobilisés pour la collecte, le traitement, voire l’analyse des données sont constitués d’une fiche d’enquête, d’un système de géolocalisation (GPS[2]) pour les prises de points de cheminement (Waypoints) et le tracé des itinéraires, d’un appareil photo numérique pour les prises de vue.

Le traitement des données collectées a été fait à l’aide d’Excel et à partir des observations faites sur le terrain. Ont été aussi mobilisés les logiciels du Système d’information géographique (SIG) pour la réalisation des cartes illustrant cette étude, notamment ArcGIS 10.3.1 et QGis 2.12.1.

Périurbanisation spontanée et enjeux sur la mobilité urbaine à Yaoundé

Lors de sa création dans les années 1980, le noyau urbain de la ville de Yaoundé est constitué d’environ 38,7 km2, soit 3 807 ha. Mais du fait d’une urbanisation rapide marquée par le développement systématique des blocs périurbains allant au-delà des limites de la zone couverte en infrastructures de transport, la mobilité urbaine devient désormais un véritable défi pour les pouvoirs publics. Malgré les systèmes de mobilités institutionnelles mis sur pied à partir des années 1973, la périurbanisation spontanée met en mal le cours de ce projet ainsi que les effets escomptés. En conséquence, en raison de l’augmentation des besoins de mobilité, on assiste à la montée d’une régulation autonome du transport.

Le périurbain de la ville de Yaoundé : une dynamique spatiale mal maîtrisée

La dynamique urbaine reste très complexe en ce sens qu’elle est fortement liée aux soubresauts du temps puisqu’elle est fondée au début de la pénétration coloniale, d’abord allemande dès 1889, puis française dès 1916. Par ailleurs, elle est structurée par des contingences socioculturelles et politico-économiques qui ont rythmé l’évolution du Cameroun ces quatre dernières décennies (Voundi, Tsopbeng et Tchindjang, 2018; Bopda, 1984; Youana, 1980). La configuration spatio-temporelle du paysage urbain de Yaoundé est fortement marquée par l’extension rapide de la ville vers ses périphéries, posant ainsi le problème de la maîtrise, par l’État, de l’espace périurbain.

Dans les années 1980, le tissu urbain de Yaoundé était très peu peuplé selon Assako Assako (2011). Mais de nos jours il connaît un développement rapide, avec une superficie considérablement sans cesse croissante (figure 2), favorisé par une croissance démographique annuelle de 2,37 %, laissant libre cours à des installations anarchiques (Tchekote et Ngouanet, 2015, p. 264). Cet étalement rapide et brusque se développe à partir des années 2000 (figure 3), bien que certaines données montrent en effet que la croissance fulgurante de la population dans ces espaces se manifeste beaucoup plus entre 2010 et 2018, même si elle est en constance évolution (tableau 1). Cela est dû en grande partie à l’accès facile à la propriété foncière dans les périphéries de la ville, en complicité avec les autorités administratives et traditionnelles (Assako Assako et Njouonang, 2016, p. 19).

Tableau 1. Croissance démographique à Yaoundé

Population/ Estimation  Années Urbaine Taux d’urbanisation
2001 Évaluée à 1,5 million d’habitant·e·s  

Passé de 48,5 % à 71  %

2010 Évaluée à 2,19 millions d’habitant·e·s
2020 Évaluée à 3,32 millions d’habitant·e·s
2035 5,6 millions  d’habitant·e·s

Source : données PDU  (2010-2020)

 

Figure 2. Évolution de l’espace urbain de Yaoundé entre 1980 et 2001 (source : communauté urbaine de Yaoundé, juin 2020)

Au regard des données issues de plusieurs travaux, la ville de Yaoundé a connu une forte métropolisation depuis la première moitié des années 2000 (Ongolo, 2002; CUY, 2010; Mfoulou Olugu, 2017). Aujourd’hui, l’extension de la ville se poursuit de manière non planifiée, où naissent de nombreux quartiers dans lesquels les habitants et habitantes se forcent d’occuper des espaces vides et relativement accessibles. Cette extension a pour principales causes la saturation des espaces centraux disponibles – ce qui a entraîné un éclatement et un desserrement de la ville –, l’abondance de l’offre de terrain en périphérie et la recherche de logements plus grands à moindre coût.

Le périurbain regroupant les zones d’habitat spontané s’étend sur 60 % de la superficie de la ville, abritant près de 70 % de la population (Voundi, Tsopbeng et Tchindjang, 2018). Ce tissu comporte, pour la plupart, des constructions en matériaux précaires, une voirie peu développée, un assainissement sommaire et un faible niveau de raccordement aux réseaux d’eau potable et d’électricité. La métropole de Yaoundé couvre une superficie estimée en 2010 d’environ 310 km² soit 28 798 hectares dont 44 % représentent la surface périurbaine (CUY, 2010). Le taux de croissance du périmètre urbanisé moyen est estimé à 9,1 % d’après le rapport de la CUY (2020). Les tendances récentes indiquent une croissance urbaine sur quatre fronts, notamment au Nord/Nord-Est (RN1 et route Soa), à l’Est (RN10 et route de Mfou), au Sud (route de Nsimalen) et au Sud-Ouest (vers l’extension de Simbock) (Plan d’actions , 2019, p. 22).

Il s’agit, en règle générale, d’une extension qui s’étale vers la sortie de la ville, limitée par le relief relativement inaccessible du côté d’Oyomabang, Nkolbisson et Leboudi. Ces quartiers sont en cours de densification, malgré l’existence en majorité des terres peu constructibles. Dans le même temps, d’autres quartiers se densifient et se consolident de manière rapide. Des études montrent ainsi une excroissance spontanée vers les sorties orientales, en dépit de l’existence des rivières Anga’a et Foulou, puis vers le Sud-Ouest, du côté d’Afanoyoa. Il en ressort que cette extension urbaine ouvre la voie à une augmentation des besoins de mobilité urbaine porteuse de défis importants sur le secteur du transport.

Impacts du périurbain spontané sur la mobilité urbaine

L’accélération du phénomène de métropolisation spontanée observé ces dernières années à Yaoundé a eu un impact important sur la mobilité urbaine. Selon les résultats du rapport du Plan directeur d’urbanisme (PDU) de la CUY de 2020, la population de Yaoundé est passée de 1,81 million d’habitant·e·s en 2005 à 3,32 millions en 2020. En appliquant les hypothèses du Plan de mobilité urbaine de 2019, la population de Yaoundé atteindrait 5,6 millions d’habitant·e·s en 2035. Cette croissance démographique dont le taux moyen, depuis le dernier recensement (2005) est estimé à 3,1 %, met en scène au moins deux niveaux d’impacts. D’abord, un accroissement du trafic et l’allongement de la distance du parcours; ensuite, une insuffisance du mode de transport institutionnel et une inaccessibilité dans les périphéries.

L’étalement de la ville, couplé à la croissance démographique (Ndzana, Etoundi Tsala et Ongolo Zogo, 2012 ), a significativement eu une influence sur l’augmentation des besoins en mobilité urbaine (tableau 2) avec un accroissement du trafic depuis 2010.

Tableau 2. Aperçu de l’évolution de la mobilité urbaine à Yaoundé

Sources : données PDU (2010)

La croissance démographique est le principal facteur de l’expansion de la zone urbanisée de Yaoundé, avec une densité d’environ 150 habitant·e·s/ha[3] hormis les grandes zones d’équipement. Au-delà de la croissance du trafic en milieu urbain, l’insuffisance de l’offre de transport, ainsi que l’accès limité dans les nouveaux quartiers affectent positivement les choix de mobilité, avec une probabilité se situant autour de 25 %. C’est seulement à partir de 2017 qu’on assiste à la renaissance de l’autobus dans le transport public; une activité concédée à une société privée (STECY) afin de combler le vide laissé par l’ancien PDU . Ce dernier avait une flotte de composée de plus de 50 grands véhicules automobiles d’une capacité de 30 à 70 places. Ces véhicules partent de 5 lignes en 2017 à près de 10 lignes un an plus tard. Ils couvrent principalement les correspondances du centre-ville, les périphéries n’étant cependant pas couvertes. Confronté à des problèmes d’aménagement infrastructurel lui permettant de desservir le corridor centre-périphérie, il est incapable d’apporter un équilibre en l’offre et la demande.

La forte demande de mobilité a poussé à une réorganisation du transport public vers plus de compétitivité et d’efficacité; et cela n’a été possible qu’à partir d’un réaménagement de l’espace urbain à travers la création des pôles de concentration urbaine où le mode de transport « artisanal » a pu se développer en supplantant le mode institutionnel.

Émergence du mode de transport artisanal : une solution de rechange pour la mobilité urbaine dans la métropole de Yaoundé

Face à la croissance urbaine exponentielle, voire de la périphérie, l’État et ses partenaires mettent incessamment sur pied un système transport collectif depuis 1973 jusqu’à nos jours (Ngabmen, Broutin et Essomba Éloundou, 2001). Ce système de transport est confronté à une demande très supérieure à l’offre du fait de l’extension spatiale très prononcée de la métropole de Yaoundé. Ainsi, cette situation favorise l’émergence du mode de transport artisanal à l’initiative des personnes privées.

De la périurbanisation spontanée à l’émergence du mode de transport artisanal : quand le secteur privé prend en main le service du transport urbain et périurbain

La remarquable périurbanisation spontanée de la métropole de Yaoundé est le fruit, entre autres, de l’échec de la planification urbaine et du trop-plein démographique dont la projection va de 2 765 568 habitant·e·s en 2015 à une estimation de 3 136 719 habitant·e·s en 2018 (MobiliseYourCity, 2019, p.4). Cette extension non préparée favorise l’émergence de pratiques artisanales de transport qui viennent en appui au problème de mobilité des personnes du centre vers les périphéries. Les quartiers périphériques à l’intérieur de la ville de Yaoundé et des arrondissements voisins sont sans cesse croissants, augmentant ainsi les demandes de déplacement du centre urbain vers les périphéries et vice-versa. La concentration des points d’embarquement dans le centre urbain (figure 3) s’explique par le fait qu’il concentre la majeure partie des sites d’activités socio-économiques, administratives et scolaires de la métropole de Yaoundé. Ceci constitue de 50% des causes de déplacements urbains.

Mode de transport artisanal : un moyen incontournable pour la mobilité urbaine et périurbaine dans la métropole de Yaoundé de nos jours

Dans le secteur du transport public à Yaoundé, le transport artisanal en général occupe une part très considérable. Il représente 53 % des moyens de transport, contre 3 % du transport institutionnel (MobiliseYourCity, 2019, p. 10). Les cibles de notre étude, en particulier les autocars et les minibus (planche 1) effectuant le transport des personnes du centre urbain vers les périphéries définies par le ministère des Transports et les communes territorialement compétentes, couvrent 3 % du transport public.

Planche 1. Minibus effectuant le transport du centre urbain vers les périphéries de la métropole de Yaoundé (Source : enquête de terrain, mai 202)
Figure 3. Emprise spatiale du transport artisanal par autocar et minibus du centre vers les périphéries de Yaoundé

Mode de transport artisanal par autocar et minibus : un moyen d’accès rapide à la périphérie urbaine

L’urbanisation, et même la périurbanisation spontanée de la métropole de Yaoundé traduit les besoins et les problèmes de mobilité urbaine. Ces difficultés s’expliquent, entre autres, par l’incapacité de l’État à mettre en place les moyens de transport en quantité suffisante. Ces moyens sont estimés à 3 autobus pour 100 000 habitant·e·s. Malgré le manque, voire le mauvais état de ces infrastructures, le transport artisanal parvient plus ou moins à satisfaire les besoins de mobilité urbaine et périurbaine dans la métropole de Yaoundé.

L’émergence de ce mode de transport par autocar et minibus date des années 1990, période où la périurbanisation commence à se ressentir de façon considérable et après l’échec de la planification urbaine. À l’exception de la zone de Soa, créée en 1994 consécutivement à l’ouverture de l’université de Yaoundé II, les autres zones sont la résultante d’une demande importante de mobilité des personnes du centre vers les périphéries et inversement; cela fait suite à une extension très prononcée de la périphérie et à l’inadéquation du système de transport institutionnel.

Figure 4. Émergence du mode de transport artisanal par autocar et minibus (source : enquête de terrain juin 2020)

Dans l’optique de satisfaire la demande de mobilité centre-périphérie, des personnes privées, à partir de leurs fonds propres, mettent à la disposition des usagers et usagères des véhicules d’une capacité comprise entre 05 et 30 places assises. Les investigations menées sur le terrain nous ont permis d’identifier au total 490 véhicules impliqués dans le transport du centre vers les périphéries urbaines (tableau 1).

Tableau 3. Nombre de véhicules par points d’embarquement du centre urbain

Points d’embarquement Nombre de véhicules Propriétaires
ENEO centrale 40 Privé·e·s
CAMAIR, Mfoundi 300 Privé·e·s
Immeuble Émergence 50 Privé·e·s
École du centre-Mokolo 50 Privé·e·s
Acropole 50 Privé·e·s
 TOTAL 490

Source : enquête de terrain, juin 2020

L’état dégradé des voies de communication partant du centre urbain vers les périphéries, ainsi que leur étroitesse constitue de véritables obstacles. Pourtant, les personnes impliquées dans l’activité de transport réussissent l’exploit de desservir ces zones à de moindres coûts fixes (tableau 2) par rapport aux taxis de ville. Étant donné que la population vivant à la périphérie du centre urbain est plus ou moins nantie, elles font du mode de transport artisanal, de nos jours, la figure de proue du domaine en zone périphérique.

Tableau 4. Coûts fixes du mode de transport artisanal du centre vers les périphéries

Source : enquête de terrain, juin 2020

L’enquête menée auprès de 70 usagers et usagères de ce mode de transport nous a révélé qu’il renferme d’énormes avantages pour la population installée dans les quartiers périphériques de la métropole de Yaoundé. Parmi ses atouts, on peut citer sa disponibilité, sa rapidité, son coût relativement bas par rapport aux taxis sur la même distance, sa proximité et sa sécurité. Ce dernier avantage sous-entend l’absence d’agression comme dans le taxi de ville et le faible taux de perte des bagages. Cela justifie pourquoi ce mode transport rafle quasiment la clientèle des taxis de ville. De même, ce type de locomotion amène certain·e·s propriétaires de voiture personnelle à changer leur moyen de déplacement vu le degré de congestion et la consommation de carburant y relative. Par exemple, sur les 70 personnes sondées, 11 déclarent que bien avant le mode de transport par autocar et minibus, elles utilisaient leur voiture personnelle pour rallier la périphérie urbaine; 27 empruntaient le taxi de ville, plus coûteux; les autres 32 constitué·e·s, majoritairement de locataires et locatrices en quête d’un loyer abordable, l’empruntent exclusivement depuis leur installation à la périphérie.

Mode de transport artisanal : un service de transport sous la vigilance des autoritésinstitutionnelles et desprivé·e·s

Le mode de transport artisanal dans les métropoles camerounaises en général et à Yaoundé en particulier, bien que pratiqué par des entrepreneurs et entrepreneuses privées, est régi par des textes réglementaires est le résultat d’une collaboration institutionnelle. Les acteurs et actrices institutionnel·le·s en présence dans la pratique du transport artisanal dans la métropole de Yaoundé sont constitué·e·s entre autres des structures suivantes.

Tout d’abord, il y a le ministère du Transport et ses services déconcentrés. À travers des arrêtés[4] réglementant le service de transport en général et le transport artisanal en particulier le ministère est, succinctement, chargé de délivrer l’agrément, les licences spéciales S1 et S4, de définir la classe de véhicule et le nombre de places, de vérifier l’état des véhicules, de définir avec la commune territorialement compétente les points d’embarquement et de déchargement avec pour base le centre urbain.

Ensuite, nous avons le ministère du Commerce. D’après nos investigations, il est chargé, à l’unanimité avec les acteurs et actrices du secteur, d’homologuer les prix du transport tant urbain que périurbain dans le contexte de notre étude.

Enfin, il y a les communes et les communautés urbaines. Le décret N°2015/4209/PM du 24 novembre 2015, fixant les modalités d’exercice de certaines compétence transférées par l’État aux communes ou aux communautés urbaines en matière d’organisation et de gestion des transports publics urbains, fait des communes et les communautés urbaines notamment de la métropole de Yaoundé des intervenants et intervenantes incontournables du service de transport, particulièrement son versant artisanal.

D’après nos investigations sur le terrain, la communauté urbaine de Yaoundé, les communes de Yaoundé (1, 2, 4, 5, 6 et 7) sont succinctement chargées de la création et de la gestion des infrastructures de transport, de l’élaboration du plan de déplacements urbains et périurbains et de la délivrance des licences et des cartes bleues. Cependant, cette vigilance à elle seule ne suffit pas pour vaincre le problème de mobilité urbaine. L’État doit aussi apporter un appui matériel et financier aux acteurs et actrices du transport dit artisanal dans l’optique de satisfaire la croissante demande de mobilité des populations.

Conclusion

Au terme de cette étude portant sur la périurbanisation spontanée et développement des modes de transports artisanaux dans la métropole de Yaoundé dont l’objectif principal était de montrer comment la périurbanisation influe sur l’émergence des modes de transports, il en ressort que la périphérie urbaine s’est élargie non seulement de façon spontanée, mais aussi de façon très rapide sous la pression démographique, dans un contexte de crise institutionnelle du système de mobilité urbaine. La relation centre-périphérie à travers la concentration des activités de la population périphérique au centre urbain trouve ici sa place et laisse donc entrevoir le développement du mode de transport artisanal, notamment par autocar et minibus comme solution incontournable au problème mobilité causé par une périurbanisation exponentielle.

Références

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Bopda, Athanase. 1984. Dynamique de l’espace urbain de Yaoundé, reconstruction et expansion postcoloniale du bâti. Thèse de 3e cycle, Université de Yaoundé.

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Ngabmen, Hubert, Broutin, Christian et Essomba Éloundou, Arsène. 2001. Libéralisation de l’exploitation des transports collectifs urbains à Douala et à Yaoundé : chronique de la mise en œuvre d’une nouvelle approche. Communication SSATP – Programme de politiques de transport en Afrique. Accra : Banque mondiale. https://www.ssatp.org/sites/ssatp/files/publications/Presentations/transportsCollectifs-Douala.pdf

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Moutila Beni, Luc. 2013. Planification urbaine au Cameroun : nature, origine et défis. Hypotheses. URL : https://moutilageo.hypotheses.org/17

Ndzana, Arnauld Philippe, Etoundi Tsala, Louis Freddy et Ongolo Zogo, Valérie. 2012. La mise en œuvre du Plan de déplacements urbains de Yaoundé : enjeux, contraintes et méthodes. Conférence CODATU XV sur « Le rôle de la mobilité urbaine pour (re)modeler les villes », 22-25 octobre, Addis Abeba (Éthiopie).

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Sakho, Pape, Chenal, Jérôme et Kemajou, Armel. 2017. Villes africaines : mobilités et transport urbains. Lausanne : EPFL PRESS.

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Youana, J. 1980. Les quartiers spontanés péricentraux de Yaoundé. Une contribution à l’étude des problèmes de l’habitat du plus grand nombre. Thèse de Doctorat de 3e cycle, Université de Yaoundé.



  1. Institut national de la statistique (INS), 2015.
  2. Global Positioning System.
  3. ha : hectare.
  4. (1) N°0000182/MINT du 16 février 2006 fixant les conditions et modalités d’exploitation à titre onéreux du service de transport urbain par autocar ou autobus; (2) N°0000184/MINT du 16 février 2006 fixant les conditions et modalités d’exploitation à titre onéreux du service de transport urbain et périurbain de personnes; (3) N°00003/MINT du 05 janvier 2017 fixant les modalités d’exploitation à titre onéreux du service du transport urbain, périurbain et rural de personnes par minibus.

Pour citer cet article

Mendouga, Yannick, Elong Ngando Epossy, Marthe Aime et Nguidjoi, Cyrille Gabriel. 2022. Périurbanisation spontanée et développement des modes de transports dits « artisanaux » dans la métropole de Yaoundé. GARI. Recherches et débats sur les villes africaines, 2(1), en ligne. DOI : 10.46711/gari.2022.2.1.2

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