Volume 2, numéro 1 – 2022 : Interculturalité, contemporanéité et interdisciplinarité en action : vision plurielle
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Du drame colonial aux crises sociopolitiques contemporaines, en passant par la chute brutale de la monarchie, le Burundi a connu des phénomènes de déchirure sociale, de régression des mœurs, ainsi que de déni d’histoire et de culture populaire. À travers une approche socio-anthropologique, combinant la recherche documentaire et les entretiens individuels et collectifs, cet article analyse comment, dans le contexte de sortie de crises identitaires, le club culturel se présente comme un cadre de socialisation et de revendication mémorielle culturelle au moyens des rencontres, des dialogues et des circulations intergénérationnelle et interculturelle des valeurs réputées ancestrales de paix, d’unité, de solidarité, de cohésion sociale et de patriotisme. Dans ce cas, les phénomènes contemporains liés à la mondialisation, ainsi que la volonté de renaître et de revivre ensemble, permettent des continuités culturelles et se structurent entre le rural, l’urbain et le diasporique.
Geste et corruption : aspects transculturels de la représentation d’un phénomène
Le présent article se propose de mettre en exergue, sur la base d’un corpus culturellement composite, les traits gestuels communs à la représentation filmique de la corruption. Une discussion théorique de la (trans)culturalité d’un tel phénomène – aussi complexe que polymorphe – s’avère alors un détour inéluctable dont l’objectif est de rendre saisissables les schèmes régissant le fonctionnement de l’objet d’étude. Les mises en scène de la corruption peuvent-elles se prêter à une lecture transculturelle si tant est que toutes les sociétés connaissent des transgressions relevant de ce paradigme ? Les récurrences observées au niveau gestuel, dans la négociation de ces violations normatives, s’interpréteraient ainsi comme un langage transcendantal et transversal des sensibilités artistiques – en dépit des variations diatopique et diaphasique dues aux données géoculturelles et situationnelles.
Le roman de la diaspora africaine contemporaine : l’intergénéricité en question
Cet article essaie de déceler, dans le roman africain de l’immigration contemporaine, la déconstruction de l’hégémonie occidentale sur les genres littéraires. Cette tendance est marquée par le contexte pluriculturel et plurilingue des auteurs-trices et se traduit par la figuration esthétique de l’« hétérogène », du « métissage », du « puzzle », du « patchwork », etc. revendiqués comme méthodes de construction du texte romanesque par les écrivain-e-s africain-e-s de la diaspora contemporaine. Dans cette perspective, le roman africain autorise l’inter-relation de plusieurs traits génériques y compris ceux issus de l’oralité et procède par des jeux incessants avec d’innombrables codes culturels servant à traduire le monde hétérogène de la postmodernité. Celui-ci est, par ailleurs, profondément marqué par le morcellement et la pluralité informationnelle qui exigent par conséquent une littérature pluridimensionnelle. À travers la théorie postcoloniale, nous tenterons d’analyser, dans un corpus qui n’a aucune prétention à l’exhaustivité, mais qui prend en compte la représentativité, cette structure littéraire protéiforme centrée sur l’altérité, la subversion et la transgression des codes génériques.
Cet article se propose d’étudier, à travers les romans Cœur de femme de Adamou Kantagba et Le Mal de peau de Monique Ilboudo, comment l’interculturel se manifeste dans les productions littéraires des auteurs francophones contemporains. Il a pour objectif de réfléchir sur la manière dont la culture de l’autre se présente dans le roman et ses répercussions sur la structure du roman. Nous partons de l’hypothèse selon laquelle une œuvre littéraire écrite par un auteur ou une autrice francophone remet en cause l’unicité culturelle de la société de référence et que ce manque d’unité se répercute sur la structure du genre romanesque.
L’approche communicative a certainement révolutionné l’enseignement-apprentissage des langues étrangères en faisant de la communication un objectif majeur de la pratique langagière en classe. Cependant, si les concepteurs des programmes, les enseignants, ainsi que les apprenants se sont progressivement imprégnés de ses principes pour améliorer la compétence de communication, il s’avère que le volet « culture cible » est resté un aspect quasi absent dans la plupart des manuels de cours, et cela, malgré son importance. L’exploration faite de ce volet dans une enquête auprès des enseignant-e-s de français et d’anglais des camps de réfugié-e-s congolais-e-s de Musasa et Kinama, en province Muyinga du Burundi, ont montré une absence de l’approche interculturelle dans l’exploitation des programmes, certainement due à sa méconnaissance. Leurs propositions pour son intégration constituent, cependant, une base sur laquelle pourraient s’appuyer des initiatives innovantes sur le développement de la compétence de communication aux niveaux concernés.
Cette étude vise à montrer la place que le curriculum réserve aux pratiques pédagogiques prenant en charge la dimension interculturelle dans les classes du FLE du 4e cycle de l’école fondamentale au Burundi. La réflexion s’inspire des principes théoriques soutenus par des didacticien-ne-s contemporain-e-s sur l’interculturel appliquée à l’enseignement du FLE. En plus, elle s’appuie sur des pratiques enseignantes observées à l’issue d’une analyse de corpus constitué des manuels et des guides de l’enseignant-e de français en usage au cycle concerné. L’étude ainsi menée a abouti aux principaux résultats qui suivent. (1) L’approche interculturelle est d’une grande importance en classe de FLE, car elle amène l’apprenant-e à prendre conscience du relativisme culturel pour adopter une attitude de tolérance envers les cultures autres. (2) Mais la perspective interculturelle est quasi inexistante en classe de FLE au Burundi. Bien qu’elle soit annoncée dans le programme, elle est impossible à appliquer face aux contenus des manuels fortement dominés par la culture burundaise. (3) L’approche interculturelle est par conséquent inopérante parce que les démarches pédagogiques indiquées dans les guides de l’enseignant-e ne l’intègrent pas.
Ce texte propose une analyse des manuels d’enseignement du français en usage au cycle post-fondamental du système éducatif burundais dans une perspective interculturelle. Après avoir montré l’importance de développer les compétences interculturelles pour une communication plus efficiente, l’article met en évidence les lacunes qui s’observent dans les manuels et souligne les rares atouts qui s’y trouvent pour le développement de la compétence interculturelle. Il conclut que malgré que les déclarations d’intention des concepteurs et conceptrices des manuels vont dans le sens de tenir en compte de la culture des apprenant-e-s et des cultures qui sous-tendent la langue française. L’analyse de contenu, qui a été appliquée à ce corpus, révèle que les consignes de ces manuels ne sont pas à même d’aider l’apprenant-e du cycle post-fondamental à avoir une compétence lui permettant de relativiser sa culture maternelle par rapport à celle étrangère pour en créer une nouvelle culture synthétique permettant une communication langagière sans heurt ni malentendu.
Enjeux de la qualité des acteurs et actrices de l’éducation dans une perspective de Laudato si’
Ce texte analyse les qualités des principaux acteurs de l’éducation à partir de l’encyclique Laudato si’ du pape François, document centré sur le changement de nos manières de pensée, de notre regard. La lettre de l’autorité papale traite de l’ensemble des expériences, des croyances et des valeurs qui influencent la façon dont une société perçoit la réalité, réagit et construit l’avenir. En prenant appui sur le sixième chapitre intitulé « L’éducation et la spiritualité écologiques », la présente réflexion se focalise sur les enfants à former, les formateurs et formatrices. Il est question d’examiner le portrait de l’éducateur, de l’éducatrice et de l’éduqué-e dans le but de faciliter l’atteinte véritable des objectifs attendus du secteur éducatif.
Les résultats médiocres de l’enseignement du français en Afrique sub-saharienne ont convaincu les gouvernements des pays africains, appuyés par des organismes internationaux tels l’AUF, l’OIF, etc., d’expérimenter d’autres méthodes d’enseignement. Celles-ci sont en général réorientées vers des programmes de scolarisation dans les langues africaines utilisées comme des facilitateurs de l’apprentissage et de la maîtrise du français. Au Cameroun, cette insertion s’est faite dans les systèmes d’enseignement primaire et secondaire, avec chacun une formule différente. De même, l’insertion de quelques langues seulement, sur la multitude de langues que compte le Cameroun, n’est pas toujours accueillie à bras ouverts par les parents, et les apprenant-e-s non-natifs et non-natives de ces langues, qui nourrissent alors toutes sortes de stéréotypes et précisément des préjugés à l’endroit de ces langues d’ethnies autres que les leurs. Cette situation complexifie davantage l’activité d’enseignement-apprentissage, ainsi que les résultats escomptés. Et là encore, c’est sans compter que les enseignant-e-s chargé-e-s d’enseigner ces langues demeurent encore peu expérimenté-e-s. C’est sur ces aspects spécifiques que porte la présente étude issue des enquêtes menées dans le cadre du projet « Représentations sociales des langues enseignées (nationales et officielles) et incidences sur l’acquisition et le transfert de compétences interlangues : cas du Cameroun » initié par l’AUF et conduites dans les cinq zones linguistiques au Cameroun.
L’enseignement des langues nationales à l’école camerounaise se heurte à la diversité sociolinguistique. Les langues nationales choisies par la politique éducative pour être enseignées dans les écoles sont celles pratiquées dans la localité qui abrite l’école. Ce qui signifie que les apprenant-e-s locuteurs de la langue ont un avantage sur les non-locuteurs. Cette situation expliquerait-elle l’adhésion quasi optimale de ces derniers à l’apprentissage des langues nationales et le développement des compétences dans cette discipline particulière, contrairement à ce qu’on observe chez les apprenant-e-s étranger-e-s à ces langues? C’est ce que l’étude a voulu vérifier en questionnant les représentations sociales des langues nationales et leur l’incidence sur les apprentissages et les compétences en langues nationales. Une enquête menée auprès de 1500 élèves du primaire et du secondaire a révélé que les apprenant-e-s locuteurs ont une meilleure relation avec la langue nationale enseignée à l’école, s’y investissent plus sérieusement et produisent de meilleures performances en expression orale, lecture/écriture. Tandis que certain-e-s apprenant-e-s non locuteurs ont des représentations négatives de la langue nationale enseignée à l’école, lesquelles représentations affectent leur adhésion au processus d’apprentissage et leurs performances dans cette langue.